Le périple en Russie
23 jours de route, 2761 km (soit 120 km par étapes), 120h de selle, une moyenne générale de 23 km/h et un positionnement GPS 46°30'N / 30°45'E. Tout ça pour vous dire que je suis à Odessa, en Ukraine.
Dans mon plan d'avancement d'avant départ j'avais noté "Odessa : 28 juin". Finalement je suis presque dans les temps car j'y suis arrivé le 29. Un jour de retard sur un mois de voyage, je trouve que c'est pas mal.
Surtout que des épreuves il y en a eu. Lors de la mon premier carnet de voyage, je vous disais que je sortais d'une quinzaine ensoleillée, et bien les choses se sont inversées et j'ai eu le droit à une deuxième quinzaine marquée par la pluie, les orages, et même le froid. La traversée de la Roumanie a été particulièrement arrosée, d'ailleurs le pays a subi de nombreuses inondations, ce qui a forcément perturbé mon avancée. Sans soleil, obligé premièrement de limiter la vitesse, pour consommer moins d'énergie, et puis obligé de calculer les étapes de villes en villes afin de pouvoir recharger les batteries pendant la nuit, sur le secteur.
Au delà de la météo, un mot sur mon passage en Roumanie et sur mon arrivée en Ex-Urss.
Passer de la Serbie à la Roumanie a cela de paradoxal, qu'on peut avoir l'impression de quitter l'Europe pour retourner... dans l'Union Européenne. N'étant jamais allé en Roumanie, je ne savais pas vraiment à quoi m'attendre et dès mes premiers tours de roues j'ai été surpris par une ambiance très vivante et chaleureuse, mélange d'Europe et d'Orient, entre modernité et simplicité.
J'ai apprécié cette ambiance décalée, peut être unique dans l'Union, où les calèches côtoient les derniers modèles de BMW et autres Mercedes, ceci d'autant plus que j'y avais mon seul rendez-vous du périple, à Pitesti. Là, le Département d'Argès (partenaire de longue date du département de la Savoie) et des nombreux médias roumains, me réservaient un bel accueil, tout en affichant un réel intérêt au message d'eco-responsabilité porté par le périple. Un beau moment.
Quittant la Roumanie trois jours plus tard, c'est ensuite la grande étape de l'Ex-Urss qui commençait, avec l'arrivée en Ukraine. Une arrivée qui est tout d'abord une histoire de frontière. La Moldavie ayant gardé un accès au Danube (une bande de terre de quelques kilomètres seulement), elle faisait tampon entre la Roumanie et l'Ukraine. Du coup 3 frontières à passer en l'espace de 5 km ! Autant d'occasions de se faire ennuyer ou de perdre du temps, donc j'abordais ce passage avec une certaine méfiance. Mais au final, à part une heure d'attente pour sortir de la Roumanie, tout c'est passé sans problème, avec le sourire même.
Il faut dire qu'avec mon vélo un peu particulier je ne passe pas inaperçu ! En fait si lors de mon premier voyage en 2006, c'est la belle épopée de l'équipe de France de foot en coupe du Monde qui m'avait facilité le passage des frontières, je peux vous dire qu'en 2010 cette "équipe" a disparu de la surface de la terre (presque personne ne m'en a parlé), et que c'est bien mon vélo solaire qui me facilite le passage. Et tant mieux !
A la douane ukrainienne, pas la plus simple au monde, le vélo a attiré l'attention de la quasi totalité des douaniers et policiers ! Comme un trait d'union entre les peuples, le vélo, et son mécanisme intéressent et sont sources de discussions. Du coup les formalités douanières deviennent accessoires, et si j'avais quitté l'Ukraine en 2006 en devant lacher un billet de 100 dollars, j'y fais cette fois mon entrée dans la joie et la bonne humeur ! Pourvu que ça dure.
Pour ensuite arriver jusqu'à Odessa, j'ai fini de traverser le détroit du Danube (bien trop humide pour moi) puis j'ai roulé de longues heures, et dormi, au milieu des immenses champs qui caractérisent ce "grenier à blé de l'ex-urss", le tout avec de temps en temps une rapide vue sur la Mer Noire.
Mais surtout, j'ai fait mes premières rencontres, et ce dès mes premiers kilomètres en me faisant inviter à un repas de mariage dans un petit village. Générosité, vodka, rires, vin rouge (vraiment pas bon), explications de mon parcours, échanges de mails, etc..., un moment typiquement russe, qui est parfaitement illustré par cette photo, prise par un jeune moldave (le seul invité parlant un peu anglais) à qui j'avais passé mon appareil photo. En un seul flash, la scène était immortalisée, comme s'il était écrit que j'allais passé par là.
Enfin, hier en arrivant à Odessa, énorme ville du sud de l'Ukraine, au bord de la mer noire, j'ai fait deux autres rencontres furtives. Premièrement, avec Igor (à droite sur la photo), un ukrainien spécialisé dans le tunning de 4X4..., ayant été professionnel au club de rugby de Liège en Belgique... et parlant un bon français. Quelle chance. Je cherchais un magasin de vélo pour changer mes freins (déjà oui, poids du vélo oblige) et je tombe sur quelqu'un qui est allé chez lui chercher des patins de freins sur son propre vélo, pour me le donner ! Il me dit, " ON a de la chance c'est la bonne taille, et en plus je viens de les acheter, alors tu n'auras pas de problème avec ça." Là encore mon vélo solaire, qui lui semblait "incroyable", a été un formidable trait d'union entre les hommes.
Deux kilomètres plus loin, dans la banlieue d'Odessa, je suis totalement perdu. J'ai un peu honte de le dire car ça m'arrive jamais, mais j'avais perdu le Nord, ou plutôt l'Est. Du coup je m'arrête dans une station service pour demander ma route, et tombe sur un pompiste, d'origine africaine, parlant lui aussi français ! Il était tellement existé de pouvoir parler français qu'il a du un peu s'embrouiller dans ses explications car j'ai mis encore plus d'une heure et demi pour retrouver le centre ville et un hôtel ! Mais bon c'était sympa.
Au final, ces premiers jours en Ukraine m'ont rappelé que, même si j'ai encore devant moi une quantité incalculable de difficultés à surmonter et de problèmes à solutionner, je trouverai toujours sur ma route de la générosité et de l'aide, pour continuer à avancer dans mon rêve grandeur nature. C'est réconfortant et motivant !