Maria Callas, la divine - 5

16 septembre 2007, trentième anniversaire de sa mort

 

 

Maria Callas (1923-1977)

 

4– CALLAS et VIOLETTA

 

C’est assez tard dans sa carrière que Callas aborde Violetta, l’héroïne de « La Traviata » de Giuseppe Verdi. Elle éprouvait pour ce rôle la même appréhension, la même timidité et la même crainte, qu’à l’égard de ce grand répertoire italien qu’elle était destinée à faire renaître.

En 1947, après son succès spectaculaire à Vérone dans « La Gioconda » de Ponchielli, elle apparut comme un très grand soprano dramatique et pourtant, la « coloratura » de Callas que l’on définira plus tard comme « dramatique »,  déconcertait par une voix épaisse, large et puissante qui grimpait sur les cimes du suraigu et voltigeait parmi les vocalises les plus périlleuses.

Maria Callas, Traviata, acte 2, Scala 1955

C’est seulement le 14 janvier 1951, qu’elle donna vie à sa première Violetta. Pendant les sept années qui allaient suivre, elle chantera le rôle soixante-trois fois. En 1951, à Cagliari, en Amérique Centrale, en Amérique du Sud (Mexico, Sao Paulo, Rio de Janero), à Bergame et à Parme ; en 1952, à Catane, de nouveau à Mexico et enfin quatre soirs de suite aux Arènes de Vérone. Le succès l’entraîne alors vers des théâtres plus exigeants : la Fenice de Venise et l’Opéra de Rome, en passant par des soirées inoubliables à Chigago, et enfin, le 28 mai 1955, à la Scala de Milan, aux côtés  de Guiseppe Di Stefano (Alfredo) et Ettore Bastianini (Germont), sous la direction d’un chef d’exception : Carlo Maria Giulini. Le rôle, la salle, les interprètes, l’époque : tous ces facteurs contribuèrent à donner à cette représentation du 28 mai 1955, dont l’enregistrement « live » est toujours disponible aujourd’hui, une place spéciale dans la carrière de la diva. Entre temps, elle avait perdu trente kilos et gagné une silhouette, qu’elle jugeait comme indispensable pour entrer dans la peau d’une héroïne consumée par la phtisie et dont la beauté physique paraissait évidente.

 

Maria Callas, Traviata, acte 3, Scala 1955

Cette soirée fera l’objet de souvenirs et de discutions passionnés. Avant même la levée du rideau, le mot « controversé » était prononcé. Le nom du metteur en scène, le grand cinéaste Luchino Visconti était en vedette sur les affiches. Visconti qui avait une grande influence sur Callas, l’avait introduite dans un cercle d’amis dont la conversation lui fit découvrir une vie intellectuelle entièrement nouvelle pour elle. Elle partageait le souci obsédant du détail et de la soif de travail de son metteur en scène, ce qui était éprouvant pour ses partenaires, dont le grand Di Stefano qui jettera l’éponge après la première représentation. La nouvelle mise en scène de Visconti qui choqua une grande partie du public, le départ de Di Stefano qui quitta la scène avant les rappels,  provoqua des manifestations aux représentations suivantes, qui entraînèrent Giulini à rompre définitivement tout rapport avec le théâtre.. C’est dans ce contexte que Callas donna une interprétation unique et infiniment touchante, qui restera un précieux document pour ceux qui possèdent l’enregistrement.

Le triomphe personnel de Callas, à cette première, la poussera à reprendre le rôle l’année suivante, et pendant dix-sept soirées, elle sera Violetta dans un enthousiasme toujours croissant. Callas était devenu Violetta, au point qu’en 1957, elle tentera de l’écarter de ses programmes, tant ces représentations l’auront particulièrement meurtrie.

 

Maria Callas, Alfredo Kraus, Traviata, Lisbonne 1958

Cependant, le 27 mars 1958, elle triomphera sur la scène de l’Opéra San Carlos de Lisbonne, entourée d’Alfredo Kraus (Alfredo), Mario Sereni (Germont), sous la direction de Franco Ghione. Cette soirée inoubliable, également enregistrée, devient un témoignage unique dans l’histoire du chant. Elle sera deux soirs de suite, une Violetta complète et absolue, où elle passera magistralement de la naissance de la découverte de l’amour, au final ou la « mezzzo voce » semble perdre sa couleur, sa constance et son souffle, déjà gagnée par l’épuisement de la mort. Sa voix subira un tel processus de sublimation que l’on peut affirmer que tout a désormais été dit, et que plus rien ne reste à dire.

Enregistrements indispensables :

Maria Callas, Violetta
Guiseppe Di Stefano, Alfredo
Ettore Bastianini, Germont
Orchestre et Chœur du Théâtre de la Scala de Milan
Carlo Maria Guilini, direction
Enregistré en « live » le 28 mai 1955 – EMI

Maria Callas, Violetta
Alfredo Kraus, Alfredo
Mario Sereni, Germont
Orchestre et chœur de l’Opéra San Carlos de Lisbonne
Franco Ghione, direction
Enregistré en « live » le 27 mars 1958 - EMI

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