Maria Callas, la divine - 4
16 septembre 2007, trentième anniversaire de sa mort
Maria Callas (1923-1977)
4– CALLAS et AMELIA
« Il y avait en elle une étrange flamme intérieure. Elle n’était jamais la même, et pourtant toujours elle-même ». Ainsi parlait le maestro Gianandrea Gavazzeni à l’issue de la mémorable représentation du « Bal Masqué » de Verdi, le 7 décembre 1957, à la Scala de Milan. Les cinq représentions, qui se succédèrent au cours de ce mois de décembre, où Callas fut une Amelia bouleversante, comptent parmi les plus grands moments de la carrière de la cantatrice.
Maria Callas (Amelia), Milan 1957
Amelia fut le dixième rôle verdien que Callas aborda après Leonora de « La Force du Destin », Aïda, Abigaille de « Nabucco », Leonora du « Trouvère », Gilda de « Rigoletto », Lady Macbeth et Elisabeth de Don Carlo. Elle adorait ce personnage qui lui offrait toute la gamme des tentions dramatiques, de la félicité extrême à la frustration la plus grande, auxquelles son âme était sensible. Dans la dramaticité de certaines phrases et dans le registre grave de la voix, on aurait pu dire que Verdi avait composé ce rôle pour elle, et pourtant, elle cessa de la chanter après ces cinq représentations.
Maria Callas (Amelia), Giuletta Simionato (Ulrica), Milan 1957
Ce rôle, elle le connaissait depuis le début de sa carrière. Étudiante, elle en avait chanté le troisième acte à Athènes, puis repris couramment les deux principaux airs, en concert, ou pour l’enregistrement. À cette époque on la considérait comme soprano dramatique « traditionnel ». Mais avec « Le Bal Masqué », elle dévoila sa véritable voix, inclassable, qui savait avec facilité, se plier dans une authentique identification, aux atmosphères nocturnes, aux surexcitations et aux conflits psychologiques de cet opéra mélodramatique.
Maria Callas (Amelia), Ettore Bastianini (Renato), Milan 1957
Dans le rôle d’Amelia, les comparaisons avec les autres sopranos de sa génération, vont certainement en sa défaveur sur le plan de la fraîcheur et de la beauté vocale qui ont tant d’importance chez Verdi, mais aussi de la justesse, dont l’aigu a toujours été quelque peu approximatif. Mais, où Callas l’emporte incontestablement, c’est avec l’illumination de la parole et l’évidence plastique du « geste vocal ». Avec elle, les scènes qui passent inaperçues deviennent des grands moments de théâtre.
Maria Callas ( Amelia), Giuseppe Di Stefano (Riccardo), Milan 1957
Avec Amelia, Callas fut sans doute, la seule à pouvoir soutenir la ligne mélodique avec un filet de voix permettant au flux et au reflux de la musique, de faire leur œuvre, de maîtriser avec passion l’angoisse d’une femme égarée par le tourment.. Sa respiration, ses silences, ses subtiles nuances témoignent de son imagination créatrice, que son instinct n’aura jamais trompé. Elle fut une grande Amelia, unique dans son interprétation, critiquable certes, sur certains points, mais irrésistible de conviction dans l’incarnation de ce personnage désespéré et perdu à jamais.
Enregistrement de référence :
Guiseppe Verdi / Le Bal Masqué
Maria Callas, Amelia
Guiseppe Di Stefano, Riccardo
Ettore Bastianini, Renato
Giuletta Simionato, Ulrica
Orchestre et Chœur du Théâtre de la Scala de Milan
Gianandrea Gavazzeni, direction
Enregistré en direct, le 7 décembre 1957 à la Scala de Milan