Les Voix du Prieuré, le miroir des cultures révélées
« Écoute le bambou qui pleure »
Ensemble de Six Voix Solistes Résonance Contemporaine
La Bourget du Lac, Église Saint Laurent
Samedi 9 juin 2007, 20h30
Raymond Murray Schafer, « Gamelan » pour 4 voix
Robert Pascal, « Warana » œuvre nouvelle pour 6 voix de femmes et 2 joueurs de hang
Alexandros Markéas, œuvre nouvelle pour 6 voix de femmes et 2 joueurs de hang
Jean-René Combes-Damien, « ... Per (la) luna, âme tribale » pour 6 voix, flûte soliste et hang
Karl Naegelen, « Homo facere » pour 6 voix de femmes, flûte piccolo et 2 percussions
Ensemble Résonance Contemporaine
voix : Sophie Delaplane
Sophie Largeaud
Caroline Gesret
Hélène Peronnet
Audrey Pévier
Thi Lien Truong
récitante, vocaliste, flûtiste : Véronique Ferrachat
joueurs de hang : Pascale Amiot, Laurent Vichard
direction : Alain Goudard
Alain Goudard
Ce n’est qu’une histoire de miroir, instant magique, où, dans un silence impressionnant, les musiciens se retournent vers l’écran qui s’anime de quatre joueurs de flûtes de pan, derniers représentants d’une culture condamnée de ce peuple des Îles Salomon dans le Pacifique Sud, qui ouvrait le lien avec les artistes présents.
Musiques mythiques et lointaines hors du temps à l’écran, superposées, alternées aux musiques contemporaines, créatives et présentent sur scène qui se renvoient les unes aux autres, semblables et différentes, dans une fusion émotionnelle.
L’instant, le présent et le passé, le lointain, se confondent dans le lieu des regards échangés. On passe sans cesse d’un côté du miroir à l’autre côté, rejoignant, confondant et s’appropriant ces musiques différenciées, pourtant si proche des unes et des autres, jusqu’à la dernière image, sublime sur l’écran magnifié où deux femmes chantent leur chant ancestral pour l’enfant en devenir qui ne devra pas oublié. C’est enfant, c’est nous : notre avenir.
L’écran alors, s’éteint lentement. Notre voyage se termine en rêve non abouti. C’est de là-bas que nous venons, c’est ici que nous avançons. Jusqu’où ? Nous ne le saurons.
Sous cet écran géant, nous ramenant sans cesse aux sonorités douces et profondes de la flûte de pan, Alain Goudart , fondateur et directeur artistique de « Résonance Contemporaine » et son « Ensemble de Six Voix Solistes » - voix féminines exclusivement – ont interprété en un contrepoint savant, des œuvres contemporaines d’une grande difficulté et d’une beauté sans pareille, se confondant ou s’en détachant avec une aisance toute particulière.
Ce concert, spectacle tout en nouveauté, hors du commun et d’une intelligence intuitive et structurée, a fait une large place à cinq compositeurs peu connus mais particulièrement inspirés dont le génie de pure sincérité a bouleversé un public médusé.
De ce moment exceptionnel, on ne ressort pas indemne. La beauté musicale et la fulgurante technique des voix de femmes, l’admirable sonorité des flûtes revisitées de Véronique Ferrachat, les finesses et les prouesses veloutées et percutées, toutes en finesse des « hangs » - instruments stupéfiants en forme de soucoupes volantes – de Pascale Amiot et Laurent Vichard, la direction inspirée, contrôlée et incisive d’Alain Goudard, ont décuplé la force émotionnelle de ce concert original, tout en contrastes et finesses : musicalité, virtuosité, invention, création inspirée, chocs et douceurs alternés, profondeur d’un moment de bonheur intense.
Tous les acteurs (polyvalents), chant chanté, susurré, soufflé, sifflé, aux corps figés, désarticulés, gestualisés, les mains en particulier, claquées ou frottées, ont accompli un travail d’un professionnalisme exemplaire, dans des oeuvres d’une complexité extrême.
Alain Goudard et son équipe, auxquels on doit ajouter les techniciens, ont accédé à un sommet musical rarement atteint.