Chambé-Aix : Aix les Bains n'est pas une entité isolée. La Ville se définit par tout ce qu'elle contient mais aussi par la place qu'elle occupe dans son environnement, proche ou élargi, et le maillage qu'elle constitue avec celui-ci.
Fabrice Maucci : C’est justement pour cela que mon projet n’est pas uniquement communal, car cela ne correspondrait pas à certaines réalités. Nous proposerons donc aussi des actions à porter à l’échelle de la CALB (Communauté
d’Agglomération du Lac du Bourget). Au-delà, il doit y avoir un partenariat avec Chambéry plus appuyé, avec ou sans structures nouvelles, dans deux domaines essentiellement.
D’abord celui du transport, car cet espace correspond à un bassin de vie et il faut régler les problèmes à cette échelle là. Il faut aussi mettre en place un partenariat touristique. Aix les Bains a une tradition plus forte que Chambéry dans ce domaine. Toutefois les deux villes peuvent entrer en complémentarité et non en concurrence. Elles ont tout à gagner à présenter ensemble leur offre d’évènements, d’activités et d’hébergements. Aujourd’hui leur seul point de discussion dans ce domaine se situe sur le plateau du Revard, mais c’est plus souvent le terrain de la grogne et de l’affrontement. Je n’envisage pas une fusion des Offices de Tourisme mais que chaque ville devienne la vitrine l’une de l’autre.
Chambé-Aix : Pouvez vous nous expliquer en quelques mots votre slogan : Aix-Avenir : durable, solidaire, exemplaire !
Fabrice Maucci : Le nom d’Aix Avenir a été le support depuis 20 ans de l’association qui nous supporte sur le plan local et le nom de sa publication. Reprendre ce nom et « l’épaissir » exprime clairement qui on est ; les 35 personnes de la liste ont des valeurs sur lesquelles elles ne transigeront pas. Durable, car il y a une urgence écologique, il faut là agir dans l’exemplarité. Solidaire, car à Aix-les-Bains les fractures se creusent, sans doute parce que l’alternance politique s’y fait attendre. Aix a plus que jamais besoin d’une respiration démocratique. Enfin exemplarité : il faut instaurer un vrai dialogue avec la population, et surtout plus de transparence, et de rigueur dans la gestion du budget, des marchés publics et de notre patrimoine communal. En travaillant dans ces trois axes, nous répondrons aux besoins de la ville et de ses habitants, et réaliserons une rupture complète avec la majorité actuelle.
Chambé-Aix :Vous avez présenté récemment un projet concernant le logement
Fabrice Maucci : Il y a un déséquilibre énorme entre d’une part la structure et le prix de l’offre de logements sur Aix, et d’autre part les revenus dont disposent les Aixois. 46% des ménages ne sont pas imposables, mais il n’y a que 12% de logements sociaux alors que la loi indique qu’il faut un minimum de 20%. Quand on n’y a pas accès, les loyers et les prix à la vente sont très élevés. Il y a donc urgence à agir pour mettre sur le marché ce type de logement en particulier et d’autres à mi-chemin entre le prix du marché actuel et celui du social. Ce que nous observons à Aix les Bains depuis 2001 va malheureusement dans le sens inverse.
Chambé-Aix : Quelles en sont les raisons, pour vous ?
Fabrice Maucci : En début de mandat, notre commune disposait de trois leviers pour le logement social : elle possédait de nombreux et vastes terrains, pouvait préempter des terrains ou des logements existants, et à travers son PLU, avait le droit de réserver des espaces en partie à du logement social. Elle n’en a actionné aucun, montrant par les faits sa volonté de tri de la population par l’argent.
Cette insuffisance est cependant masquée par le projet de rénovation du quartier Franklin-Lafin. L’ensemble des logements sociaux qui sont prévus à cette occasion viendront seulement en remplacement de ceux qu’on aura détruit : il n’y a pas d’offre supplémentaire.
Ma proposition est d’utiliser les outils cités et d’en utiliser de nouveaux qui ne coûteront pas un euro de plus, comme l’AIVS, l’Agence Immobilière à Vocation Sociale : la Ville louerait de manière garantie aux propriétaires des 430 logements vacants, et sous-louerait aux ménages qui en ont besoin, les deux transactions se faisant 30% sous le prix du marché.
Chambé-Aix : Vous avez exposé également, samedi dernier, le thème de l’écologie
Fabrice Maucci : Je précise que notre prise de conscience ne date pas du Grenelle de l’environnement. Sur ces questions, il faut que la collectivité donne l’exemple et soit l’élément moteur de l’information et de l’incitation des particuliers et des entreprises.
Nous traiterons de l’eau, les déchets, du cadre de vie mais les deux axes essentiels qui doivent être considérés sont selon nous l’énergie et le déplacement.
En ce qui concerne l’énergie, la Ville, les Aixois et les entreprises doivent être en mesure d’économiser beaucoup d’énergie et devenir producteurs d’énergies renouvelables. La Ville doit s’engager pour que plus aucun de ses bâtiments ne soit hors des normes de haute qualité environnementale. Elle ne se contentera plus de subventionner ceux qui n’en n’ont pas besoin. Elle investira pour elle, notamment dans le solaire photovoltaïque, amortissant les coûts sur une période de 6 à 10 ans grâce aux subventions et à la revente de l’électricité. Mais elle facilitera aussi l’investissement des autres sans engager des moyens énormes.
Prenons un exemple. Aujourd’hui un particulier ou une entreprise sont aidés environ à hauteur de 50% lorsqu’ils font un effort d’investissement dans les énergies renouvelables, mais la somme restant à payer est lourde et il faut en plus pouvoir avancer la somme totale, ce qui fait renoncer certains. Deux pistes sont envisageables.
La commune ou la CALB peuvent avancer la partie subventionnable du montant des travaux, et encaisser plus tard les aides normalement versées au demandeur. Pour réaliser 20m² de panneaux à 20000 euros, un Aixois n’aurait plus à sortir que les 10000 euros de dépense finale, la collectivité avançant l’autre moitié qui lui sera restituée six mois plus tard. La Ville a rendu le projet possible mais n’a pas perdu 1 euro.
Dans l’optique d’un partenariat gagnant/gagnant, la Ville pourrait aussi louer à l’euro symbolique le toit de copropriétés ou d’entreprises, pour y construire et exploiter des équipements photovoltaïques. En revendant l’électricité produite pendant une période estimée dans une fourchette de 6 à 10 ans, elle récupérerait sa mise et l’équipement serait rétrocédé au propriétaire du toit.
En ce qui concerne le déplacement, Chambéry Métropole et la CALB devraient mettre en route des études pour la construction d’un réseau de transport collectif unifié, incorporant pourquoi pas un Tram-Train pouvant utiliser l’axe ferroviaire existant. Le seuil de 300 000 habitants est habituellement un minimum pour qu’un tramway soit envisageable. De Grésy-sur-Aix à Montmélian notre longue agglomération n’en compte que 200 000, mais sa forme particulière, un « couloir urbain », nécessiterait moins de lignes pour être couverte qu’une autre agglomération.
Autant je suis convaincu de la nécessité d’un tel projet, autant je doute personnellement la volonté de l’équipe aixoise actuelle de faire d’un tel investissement une priorité. Elle n’a pas su consacrer 5 à 10% de son budget d’investissement pour le logement, en trouvera-t-elle autant pour un nouveau transport public ?
Chambé-Aix :Vous souhaitez lier le Tourisme avec le Thermalisme
Fabrice Maucci : Aix les Bains est de moins en moins une ville thermale, et je le déplore. Elle a perdu 35% de fréquentation dans ce domaine depuis le début de 2001. Notre ville a également du mal à développer une activité purement touristique. Et tout cela est paradoxal car elle garde des atouts sur ces 2 créneaux, qu’on a jusqu’ici ignoré ou gâchés. Mais elle a aussi ses fragilités, qu’on n’a pas assez cherché à gommer.
Les atouts sont le lac, la montagne, le Parc National des Bauges dont Aix les Bains est une ville porte. Les activités autour du patrimoine et de la culture peuvent être développées, renforcées par l’offre des deux villes voisines que sont Chambéry et Annecy. On n’a pour l’instant pas su trouver comment développer harmonieusement le Revard et les espaces des bords du lac. Musilac est bien une indéniable réussite, mais menacée par un manque de cohérence : le projet de Marina au bord du lac, sur le lieu même du festival, déplacerait le lieu de la manifestation, qui n’aurait plus lieu de garder son nom, perdrait son ambiance et son impact. Ce projet d’aménagement pourrait donc saborder le festival.
Nos faiblesses, elles, tiennent en partie aux projets actuels de développement touristique.
Aix a d’abord une cible et une communication trop élitiste. Des villes comme Evian, Divonne les Bains, Annecy sont déjà sur le créneau, leurs prestations sont adaptées à cette clientèle. C’est une lubie que de vouloir retrouver la fréquentation huppée digne de celle de la Belle Epoque.
Par ailleurs, on manque de contenu d’activités touristiques. Que peut faire un curiste, présent à Aix pour 3 semaines et qui ne choisit pas son lieu de séjour que sur les soins ? Pareillement, que fait un touriste chez nous lorsqu’il pleut ou lorsqu’il vient en basse saison ?
Enfin, Aix les Bains doit devenir une station accessible aux classes moyennes, aux familles, et notre hébergement reste inadapté.
En matière thermale, il ne faut pas qu’Aix les Bains perde son seul point fort, son savoir-faire thérapeutique qui peut s’éteindre si on n’y prend pas garde. Pour les différents soins, l’accueil et l’attente des patients ne sont pas à la hauteur. Il faut améliorer la liaison Thermes Chevalley – Centre Ville. La sortie de l’Etat doit être préparée mais pas avec une privatisation complète. Compte tenu du rôle des Thermes dans l’économie locale et des 11 millions d’euros investis par la commune depuis 10 ans dans cet outil, la collectivité locale doit être co-pilote du futur navire.
Chambé-Aix : Vous avez souhaité vous exprimer sur les thèmes de la transparence et de la démocratie locale
Fabrice Maucci : Au-delà des problèmes de fond, de nouvelles pratiques politiques sont à instaurer : démocratie participative, transparence, qualité de l’information donnée aux citoyens.
Cela commence par un plus grand respect des minorités élues au Conseil Municipal, mais il faut aussi impliquer tous les citoyens aixois, très en amont des grandes décisions stratégiques, et ne pas les mettre devant des projets déjà ficelés présentés lors de grandes réunions. Des outils doivent être mis en place : comités consultatifs de quartier et budgets participatifs. Pour ce dernier point, une enveloppe pourrait être définie, destinée à des équipements de proximité dont l’utilisation serait déterminée par une consultation annuelle des Aixois par un dispositif à envisager.
La transparence, il y en a aujourd’hui trop peu sur les marchés publics, dans le choix des prestataires. Il y a un flou énorme sur les cessions foncières : on a vendu des terrains à des prix très bas, sans publicité, sans mise sur le marché, les acheteurs retenus sont parfois restés inconnus du Conseil Municipal, masqués par des SCI dont les membres ne nous étaient pas divulgués au moment du vote et se révélaient après coup, être souvent les mêmes ! Si je suis élu maire, je souhaite aussi à ce que la minorité du conseil participe à la commission de recrutement et aux attributions de logement.
L’information donnée aux citoyens doit être irréprochable et complète. Il ne faut plus que les conseillers municipaux puissent se cacher derrière un « c’est plus compliqué que ce que vous croyez ». Le bulletin municipal doit faire autre chose que de relater de faits secondaires, il doit être un bulletin de formation du citoyen.
Chambé-Aix : Merci Monsieur MAUCCI